mercredi 19 mars 2014

Les passions nous empêchent-elles de faire notre devoir ?

    La passion est avant tout définie comme étant un sentiment tyrannique qui dicte, qui détermine notre comportement. Par exemple, la passion amoureuse peut nous pousser, contre notre volonté (c'est-à-dire contre notre jugement réfléchi), à des actions qui vont à l'encontre de notre propre intérêt, pouvant aller jusqu'à l'encontre de notre propre survie.
Le devoir, quant à lui, connaît deux composantes : sociale et morale.
Le devoir social est ce que nous devons aux autorités de l'Etat particulier dans lequel nous vivons.
Le devoir moral, lui, est universel (et non particulier). Il consiste essentiellement en le respect de la personne humaine, de sa dignité.
Un individu soumis à sa passion, à son sentiment, pourrait oublier ce qu'il doit à l'Etat et/ou à l'humanité en général : il pourrait aller jusqu'à commettre des actes illégaux, tant du point de vue de son Etat particulier que du point de vue de l'universalité de la loi morale.
    La question est alors de savoir s'il est possible qu'un sentiment tyrannique déterminant notre comportement aille à l'encontre de notre devoir social et/ou de notre devoir moral, ou bien si, au contraire, l'existence d'un tel sentiment tyrannique puisse aller de paire avec la réalisation de nos devoirs.
    Afin de répondre à cette question, nous verrons d'abord en quoi le sentiment tyrannique nous écarte du droit chemin (tant sur le plan politique que sur le plan moral). Pourtant, nous noterons que, sans une certaine passion, la réalisation de nos devoirs semble impossible. Enfin, nous nous interrogerons sur la possibilité d'une action par devoir, purement désintéressée.

I / La passion nous écarte du droit chemin :

  • Médée
  • Saint-Paul

II / La passion est nécessaire au véritable devoir :

    Les hommes n'agissent qu'en fonction de leur intérêt, y compris lorsqu'ils réalisent leurs devoirs.

A / L'amour de soi :

La nature de l'homme est d'être soumis à l'amour de soi :

« L’homme naturel est tout pour lui. »
Rousseau

« L’amour de soi est le seul motif qui fasse agir les hommes. »
Ibid.

« De toutes les passions, la plus forte est l’amour de soi (self-love). »
Adam Smith (1723 - 1790), Ecosse

Ainsi, toutes les actions de l'individu sont naturellement en fonction de son intérêt.

B / L'action conforme au devoir, selon Kant :

Prenant l'exemple du commerçant et de l'enfant pour illustrer ce qu'est la morale, Kant analyse la seconde possibilité qui s'offre au commerçant : l'action conforme au devoir. Dans cette situation, le commerçant rend le trop-perçu à l'enfant, non pas au nom de la morale, mais dans l'intérêt égoïste de s'assurer une bonne réputation de commerçant honnête et/ou pour avoir bonne conscience de ne pas avoir cédé à la tentation de l'immoralité. Ainsi, dans cette seconde situation, le commerçant réalise certes une action conforme au devoir moral du point de vue de la stricte extériorité, mais pour de basses raisons intéressées, égoïstes, dans l'intériorité.

C / La passion : moteur de l'Histoire.

Comme rien dans le monde ne se fait sans amour de soi, sans intérêt :

« Rien ne se fait dans le monde sans passion. »
Hegel

La passion, qui anime les guerres, est le moteur de l'Histoire, selon Hegel.
Cette passion est également le moteur des actions qui réalisent les devoirs, comme elle est le moteur de toute action ici-bas.

III / Vers une action par devoir, désintéressée ? 

    L'amour de soi, l'intérêt étant le trait essentiel de la nature humaine, pour penser la possibilité d'une action par devoir, purement désintéressée, il nous faut sortir de la nature humaine. Une action par devoir sans passion n'est possible que sous l'effet de la grâce divine qui nous élèverait au-delà de notre nature et donc de nos basses considérations égocentrées. 

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